Points saillants
Selon l’interprétation de la Cour d’appel dans Scaduto v. Law Society of Upper Canada, 2015 ONCA 733, 2015 CarswellOnt 16545, 81 C.P.C. (7th) 258, 343 O.A.C. 87, la règle 2.1 n’est applicable que : 1) si l’acte de procédure permet clairement de constater que le recours constitue un recours abusif au tribunal; et 2) si l’acte de procédure justifie le recours au processus d’atténuation de la règle 2.1.
Analyse. (…) Le tribunal a déclaré qu’il convenait de restreindre l’application de la règle 2.1 aux cas les plus évidents lorsque (i) le caractère abusif du litige est évident à la face même de l’acte de procédure; et ii) l’acte de procédure justifie le recours au processus d’atténuation de cette règle : Scaduto v. Law Society of Upper Canada, 2015 ONCA 733, 2015 CarswellOnt 16545, 81 C.P.C. (7th) 258, 343 O.A.C. 87.
Dans R. v. Sussex Justices, Ex parte McCarthy (1923), [1924] 1 K.B. 256, [1923] All E.R. Rep. 233, une affaire de partialité judiciaire, le lord juge en chef Hewart a affirmé que, dans bien des affaires, on constate qu’il n’est pas simplement important mais plutôt essentiel que la justice ne soit pas seulement rendue, mais qu’elle semble manifestement et incontestablement avoir été rendue. Dans le même ordre d’idées, le vice-Chancelier Megarry, de la U.K. Chancery Division, aimait bien la question de pure forme suivante : qui est la personne la plus importante dans une salle d’audience? (Voir Temptations of the Bench (1978), 16 Alta. L. Rev. 406.) Ce n’était pas le juge, dit-il. Et ce n’était ni l’avocat du demandeur ni l’avocat du défendeur, aussi éminents juristes soient-ils. Non, la personne la plus importante dans la salle d’audience était le plaideur qui allait perdre. Il était important, pour le maintien de la foi envers le système judiciaire, que les parties qui ont été déboutées soient convaincues qu’elles ont été traitées équitablement. On propose alors que, selon ce principe, la règle 2.1 soit appliquée de façon restrictive — seulement lorsque la nature abusive du litige est apparente à la lecture de l’acte de procédure — et qu’elle ne serve pas à envoyer promener certains plaideurs.
Jurisprudence récente. La Cour d’appel a traité de la règle 2.1 dans Scaduto v. Law Society of Upper Canada, 2015 ONCA 733, 2015 CarswellOnt 16545, 1 C.P.C. (7th) 258, 343 O.A.C. 87, et a déclaré que la règle 2.1 ne s’applique pas aux cas limites; la règle s’applique plutôt à une instance qui, à première vue, semble frivole, vexatoire ou abusive et si l’acte de procédure démontre que le recours à cette règle est justifié. Dans Asghar v. Alon, 2015 ONSC 7823, 2015 CarswellOnt 19142 (C.S.J.), le tribunal a appliqué l’arrêt Scaduto, concluant que cette règle s’applique seulement si a) l’affaire est, à première vue, frivole et vexatoire une fois généreusement prises en considération les lacunes des actes de procédure; et b) s’il y a des motifs de recourir au processus d’atténuation de cette règle, par exemple s’il y a lieu de craindre que le recours du demandeur constitue un recours abusif au tribunal dans le cadre des procédures normales de ce dernier.
Dans Purcaru v. Vacaru, 2016 ONSC 1609, 2016 CarswellOnt 3486 (C.S.J.), le tribunal a traité de la relation entre la règle 2.1 et la règle 1 (8.2) des Règles en matière de droit de la famille.
Plusieurs affaires ont fourni des lignes directrices quant à l’utilisation de la règle 2.1 : dans Shafirovitch v. Scarborough Hospital, 2015 ONSC 7627, 2015 CarswellOnt 18610 (C.S.J.), le tribunal a statué que, dans les affaires exceptionnelles, il n’a pas besoin d’attendre de recevoir les observations avant de rejeter une demande. (Dans cette affaire, le tribunal avait rejeté une demande dans laquelle le demandeur soutenait que les forces militaires lui avaient implanté un dispositif de lavage de cerveau et que le personnel de l’hôpital avait lancé des insectes sur lui afin de pouvoir l’interroger.) Dans Gebremariam v. Dick s, 2015 ONSC 7447, 2015 CarswellOnt 18176 (C.S.J.), le tribunal a noté que, même si les allégations factuelles du demandeur semblaient farfelues, cela ne les rendait pas fausses, frivoles ou vexatoires, et il a précisé que la demande alléguant que la police avait camouflé un crime devait être traitée en vertu de la règle 20 ou 21, et non en vertu de la règle 2.1. Dans Kavuru v. Ontario (Guardian and Trustee), 2015 ONSC 6877, 2015 CarswellOnt 18764 (C.S.J.), le tribunal a statué que le défendeur n’avait nullement besoin d’entamer les procédures en déposant des arguments écrits, mais qu’une lettre de présentation en guise de demande suffisait et qu’il pouvait également déposer des copies de décisions judiciaires. Toutefois, aucune preuve n’est admissible selon cette règle. Dans Kyriakopoulos v. Lafontaine, 2015 ONSC 6067, 2015 CarswellOnt 14823 (C.S.J.), le tribunal a affirmé que les arguments ex parte accompagnés de preuves et documents sans serment ne sont ni justes ni appropriés. Le défendeur qui estime nécessaire de soumettre des arguments et de déposer des documents avec une demande en vertu de la règle 2.1.01 (6) doit comprendre que cette règle ne s’applique pas à l’espèce. Et, dans Cheng v. Lee, 2015 ONSC 5148, 2015 CarswellOnt 12344, 78 C.P.C. (7th) 141 (C.S.J.), le tribunal a noté que cette règle ne s’applique pas simplement pour permettre d’épargner de l’argent. La règle ne s’applique que de façon limitée aux demandes qui, à première vue, sont frivoles ou vexatoires ou constituent un recours abusif au tribunal, et dans lesquelles le processus abrégé est requis afin d’éviter les risques que représente un plaideur qui agirait de façon vexatoire.
Le tribunal a rendu de nombreuses décisions en vertu de cette règle : dans Raji v. Myers, 2015 ONSC 4066, 2015 CarswellOnt 9803, 75 C.P.C. (7th) 115, [2015] O.J. No 3436 (C.S.J.), le tribunal a rejeté une action contre un juge qui avait rejeté une action préalable en vertu de cette règle; et, dans Guettler v. Royal Bank of Canada, 2015 ONSC 2905, 2015 CarswellOnt 6834, 72 C.P.C. (7th) 295 (C.S.J.), le tribunal, qui semblait accorder très peu d’importance à l’exigence « à première vue », a rejeté une action après avoir conclu que le demandeur n’avait pas qualité pour agir et que sa déclaration ne révélait aucune cause d’action.
Toutefois, dans les affaires qui suivent, le tribunal a refusé de rejeter une instance en vertu de cette règle : dans Allevio Healthcare Inc. v. Kirsh, 2015 ONSC 4539, 2015 CarswellOnt 10526, 77 C.P.C. (7th) 211 (C.S.J.), le tribunal a conclu que l’instance n’était pas à première vue viciée lorsque la déclaration faisait référence à une action devant la Cour des petites créances sans en révéler l’issue et que des éléments de preuve devaient être produits pour invoquer des moyens de défense tels que la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, l’abus de procédure et la contestation incidente. Dans Posadas v. Khan, 2015 ONSC 4077, 2015 CarswellOnt 9591, 75 C.P.C. (7th) 118 (C.S.J.), dans lequel un acte de procédure était vicié mais non pas, à première vue, frivole, vexatoire ou de nature abusive, le tribunal a refusé de rejeter l’instance en se fondant sur cette règle mais a permis aux défendeurs de présenter une motion en vertu des règles 20, 21.01 ou 25.11. Et, dans Asghar v. Alon, 2015 ONSC 3835, 2015 CarswellOnt 8892, 74 C.P.C. (7th) 311 (C.S.J.), le tribunal a refusé de rejeter une action en diffamation dont la déclaration était viciée, mais a plutôt, de sa propre initiative, suspendu l’instance jusqu’à ce que le demandeur ait modifié sa demande en vertu de la règle 26.02a).
Anciennes règles : Aucune.