Bird c. Fort Frances (Ville de), (1949) O.R. 292 [1949] 2 D.L.R. 791 (H.C.J.)

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  • Date : 2024

Bird c. Fort Frances Haute Cour de l’Ontario [1949] 2 DLR 791

[Traduction du CTTJ du 1er novembre 1990 — © CICLEF, École de droit, Université de Moncton]

LE JUGE EN CHEF McRUER, DE LA HAUTE COUR. Il s’agit d’une action visant à recouvrer un montant de mille quatre cent trente dollars de la défenderesse, somme confisquée au demandeur par l’agent principal Gaston Louis Camerand et par la suite remise au trésorier de la municipalité défenderesse, lequel la conserve en dépôt dans un compte d’épargne de la succursale locale de la banque Dominion.

En mai 1946, le demandeur, qui avait douze ans à l’époque, jouait avec d’autres garçons à l’arrière d’une salle de billard située sur un terrain privé dans la ville de Fort Frances. Dans le cadre du jeu, il a tenté de ramper sous le bâtiment; ce faisant, il a vu une boîte de conserve sur une tablette faisant partie de l’infrastructure de l’édifice. Il a découvert que la boîte contenait une importante somme d’argent en billets de banque. Il en a pris possession, puis, après un incident dans un bac à charbon, qui n’a pas été exposé en détail au procès et qui n’est pas pertinent quant à la présente affaire, au cours de laquelle une partie de l’argent a été perdue, il a rapporté de mille quatre cents à mille cinq cents dollars à la maison. Il a remis presque tout l’argent à sa mère, qui l’a caché sous le coussin d’un fauteuil. Quelques jours plus tard, compte tenu des grandes dépenses faites par le demandeur, l’agent principal l’a interrogé. Le demandeur a fait un récit exact des faits, a révélé qu’il avait soixante dollars sur lui et divulgué où se trouvait le reste de l’argent. L’agent principal s’est rendu à la résidence du demandeur, sans mandat de perquisition. Il a demandé l’argent à Mme Bird, qui le lui a remis sans faire objection. L’agent principal a déclaré dans son témoignage qu’il entendait mettre l’argent en lieu sûr de façon à le remettre à son propriétaire légitime si on devait le trouver. Il a dit l’avoir conservé pendant un certain temps, puis, ne trouvant pas le propriétaire, l’avoir remis au trésorier de la municipalité. Ce dernier a déclaré que lorsqu’il a reçu l’argent de l’agent principal, l’agent lui a déclaré qu’il s’agissait d’argent trouvé et lui a demandé de le conserver en lieu sûr. La somme a finalement été déposée le 23 décembre 1946 dans un compte d’épargne spécial au crédit de la ville de Fort Frances, désigné « Fonds à la disposition du tribunal ». Le solde du compte le 27 septembre 1948 était de mille quatre cent soixante dollars et soixante et un cents.

Dans son exposé de la défense, la défenderesse prétend que les sommes ont été trouvées sur des lieux appartenant à feu John Sandul et qu’elle était justifiée de les conserver en qualité de fiduciaire du véritable propriétaire. Le paragraphe 2 de l’exposé de la défense est le suivant :

La défenderesse prétend qu’elle a conservé ces sommes de bonne foi, en qualité de fiduciaire du véritable propriétaire, et demande au tribunal de lui donner des directives concernant leur versement, compte tenu du fait que l’exécuteur de la succession de feu John Sandul a déjà exigé de la défenderesse que les sommes lui soient remises.

Aucune preuve n’a été produite au procès de l’exigence de l’exécuteur testamentaire de feu John Sandul. Je crois comprendre que les avocats conviennent qu’aucune demande de ce genre n’a été faite. Au cours du procès, l’avocat a dit que l’exécuteur désirait produire une déclaration devant le tribunal. J’ai donné à entendre qu’à moins que l’exécuteur ne réclame l’argent et ne soit prêt à le faire formellement, en s’exposant aux dépens éventuels, je n’étais pas disposé à l’entendre. La question a alors été abandonnée. Quels que soient les droits de la succession de John Sandul, ils ne peuvent être pris en compte pour décider la présente action.

Les faits sont simples, mais philosophes du droit, juristes et auteurs se sont penchés passionnément tout au long de l’évolution de notre jurisprudence sur le droit applicable. À certains égards, le droit britannique ne peut encore être considéré comme établi.

Il convient en premier lieu d’examiner l’affaire sous les aspects suivants : les droits du demandeur qui a trouvé l’argent; la question de savoir si le fait d’enlever l’argent de la propriété d’un autre constitue un acte de nature criminelle; si c’est le cas, l’incidence que cela a sur son droit de recouvrement contre la défenderesse; enfin, la question de savoir si la possession du demandeur existait toujours au moment où la somme a été remise à l’agent principal, ou si elle été interrompue de façon à l’empêcher de faire valoir son droit d’action.

Le droit d’action du demandeur, s’il existe, dépend de la question de savoir s’il a été injustement privé de la possession de la somme par l’agent principal et de celle de savoir si la défenderesse continue à entraver illicitement sa possession. Je ne pourrais mieux préfacer l’examen du droit applicable qu’en citant un extrait du chapitre sur la possession de Holmes, Common Law (1948), à la page 239, où l’auteur énonce un principe fondamental très ancien : « Les faits qui constituent la possession sont source de droits au même titre que les faits qui constituent la propriété, bien que les droits d’un simple possesseur soient moins étendus que ceux d’un propriétaire ».

[…] [Je dois examiner] la question de savoir si le demandeur est un « véritable inventeur » de l’argent, au sens où le terme est utilisé dans la jurisprudence, ou si le propriétaire du bien-fonds où l’argent a été trouvé avait un intérêt sur celui-ci. Je dois également décider si le demandeur a simplement commis une faute ou s’il était, en droit, coupable d’un acte de nature criminelle. Si la prise de possession en l’espèce constituait un acte de nature criminelle, je dois alors, apparemment pour la première fois en droit britannique, décider si un voleur peut intenter une action en appropriation illicite contre celui qui l’a illicitement privé de la possession de la chose volée. Si la prise de possession ne constitue qu’une faute, sans intention criminelle, la marche à suivre est beaucoup plus claire.

Je cite de nouveau un passage de Holmes, op cit., aux pages 241 et 242 : « Les conséquences découlant de la possession sont, pour l’essentiel, les mêmes que celles découlant de la propriété, sous réserve de la question de la subsistance des droits possessoires […] Même le possesseur illicite d’un chatel possède un recours en dommages-intérêts pour son appropriation illicite par une personne n’y ayant aucun droit, ainsi que le droit de recouvrer la chose elle-même. »

La première mention de ce sujet que j’ai pu trouver en droit anglais figure dans Brooke’s Abridgment, 1586, s.v. « Trespass », pl. 433; il renvoie à Y.B. 13 Henry VII.10, où l’on trouve l’énoncé que celui qui a pris possession illicitement a un droit opposable à tous, sauf au véritable propriétaire. (L’examen de l’annuaire ne semble pas confirmer l’exactitude de ce renvoi.) Bien qu’on trouve dans l’arrêt Armory c.Delamirie, 1 Str. 505, l’énoncé suivant lequel celui qui a trouvé un objet a « un droit de propriété qu’il peut opposer à tous, sauf au propriétaire légitime, et peut par conséquent intenter une action en appropriation illicite », cette affaire ne traite pas de la pertinence des circonstances dans lesquelles l’« objet perdu » a été « trouvé », ce qui était le cas dans l’affaire Hibbert c. McKiernan [[1948] 1 All ER 860 (C.B.R.)].

Dans l’ouvrage Goodeve on Personal Property, 8e éd., aux pages 38 et 39, on lit ceci : « Le possesseur peut posséder sans autre titre sur les biens. La mainmise exclusive et excluante peut être le fait de l’inventeur, de l’emprunteur, du prêteur sur gage, du non-propriétaire de bonne foi qui croit être le propriétaire, d’un intrus, même d’un voleur, comme du véritable propriétaire. » (Les italiques sont de moi.)

La seule jurisprudence invoquée à l’appui de cet énoncé, qui va plus loin que ce que j’ai pu trouver dans tout autre ouvrage, est la décision Buckley c. Gross (1863), 3 B. & S. 566, 122 ER 213. Je suis loin d’être convaincu que les opinions formulées dans cette affaire justifient l’inclusion, sans restriction, des termes « même un voleur » dans l’énoncé, et il est clair que cet aspect du droit n’était pas l’élément central de la décision. Il s’agissait d’une action en dommages-intérêts pour appropriation illicite de suif recouvré de la Tamise et des égouts de Londres après un incendie dans certains entrepôts, puis vendu au demandeur. Le suif lui avait été enlevé par un agent de police qui l’avait découvert transportant le suif dans les rues de Londres la nuit. Il a été accusé de l’avoir en sa possession sachant qu’il avait été volé. L’accusation a été rejetée, mais une ordonnance a été rendue en application de la loi 2 et 3 Vict., chap. 71, art. 29, suivant laquelle le suif devait être remis, puis vendu par le commissaire de police de la métropole. Les défendeurs se sont portés adjudicataires. Le juge en chef Cockburn a déclaré qu’il n’était pas nécessaire de « décider si une personne qui est en possession d’un chatel sans aucun titre peut, si la possession lui en est enlevée par un fautif, intenter une action contre celui-ci et contre les personnes qui l’ont obtenu de lui autrement que de bonne foi et à titre onéreux »  [p. 561]. Le juge en chef a poursuivi en statuant que dans cette affaire le défendeur ne tirait pas son droit d’un fautif, mais bien des dispositions de la loi autorisant la vente. À la page 572, il s’exprime comme suit : « Cette disposition législative prive le demandeur de la simple possession qui est tout ce qu’il détenait (et qui aurait suffi contre un fautif). »

Le juge Crompton a déclaré ceci à la page 573 : « Il est clairement établi que la possession seule suffit pour fonder une action en appropriation illicite ou en atteinte contre un fautif qui enlève un bien à une personne qui en a la possession. Il n’est pas évident, cependant, que le demandeur, ou la personne de laquelle il a acheté le suif, ait été un inventeur au sens du principe posé par la jurisprudence, et notamment par l’arrêt Armory c. Delamirie, 1 Str. 505. Je suis d’avis, compte tenu de la preuve et des conclusions qu’elle justifie, qu’il se trouve plutôt dans la situation d’une personne qui en a illicitement ou peut-être criminellement obtenu la possession, alors que la jurisprudence me paraît envisager la possession de l’inventeur de bonne foi. »

Le juge a convenu avec le juge en chef que lorsqu’on enlève légalement à une personne la possession d’un bien, et que le bien a été finalement approprié par une personne qui ne tire pas son droit du fautif initial, la personne qui en a perdu la possession de cette façon n’a pas de droit de propriété au moment de l’appropriation illicite. À la page 574, il s’exprime comme suit : « Je suis d’avis que l’agent avait le devoir d’arrêter le demandeur et de confisquer le suif, et cela même sans se fonder sur la loi 2 et 3 Vict., chap. 71. La défenderesse en l’espèce ne tire pas son droit de l’agent; même si c’était le cas, celui-ci n’a commis aucune faute. »

Cette décision n’explique pas quel aurait été le résultat en l’absence des dispositions législatives, et si le demandeur avait pu opposer sa possession de nature criminelle à un fautif.

À la page 574, le juge Blackburn déclare : « Je n’entends pas contester le principe établi par plusieurs décisions, suivant lequel la possession d’un bien personnel constitue un titre opposable à un fautif ni que l’on ne peut opposer comme défense au demandeur en pareil cas le fait qu’un tiers pourrait légalement lui reprendre le chatel. Je ne crois pas qu’il faille faire de distinction selon que les biens ont été pris criminellement ou non. »

Le juge, partant du principe que c’est là l’état du droit, a statué que le demandeur n’était pas visé par cette règle. Il a statué également que le simple fait que le suif en question était mélangé avec d’autre et qu’il était impossible de déterminer les propriétaires respectifs de la masse ne signifiait pas que le bien, dont on connaissait les propriétaires, appartenait à celui qui l’avait ramassé. Il a poursuivi en disant que l’agent était fondé de confisquer un bien transporté dans les rues de la métropole à une heure très matinale par une personne qui n’y avait pas droit en common law et de l’apporter devant un juge de paix. Une fois que le juge a conclu que le suif provenait des entrepôts en flammes, les policiers étaient en droit de le conserver pour le véritable propriétaire, parce qu’ils avaient constaté qu’il y avait un véritable propriétaire et qui il était. Leur possession était celle du véritable propriétaire et non celle du fautif, dont la possession avait été éteinte par leur prise de possession.

Dans Pollock & Wright on Possession, 1888, à la page 187, on trouve l’énoncé suivant :

Si un inventeur a des raisons de croire qu’une chose a été abandonnée par son propriétaire, que celle-ci l’ait été ou non, et qu’ils commettent une intrusion civile ou non, il ne peut y avoir de vol initialement parce que la conviction que l’appropriation sera invito domino, qui est essentielle à l’intention de voler, est absente. Une appropriation subséquente, même après qu’on eut découvert que le propriétaire n’avait pas l’intention d’abandonner le bien, paraîtrait protégée par l’immunité que reconnaît la jurisprudence moderne à l’inventeur de bonne foi.

Celui qui trouve un objet perdu peut, comme tout autre possesseur, faire valoir une action pour intrusion, vol et appropriation ou rétention illicite contre un tiers.

Dans l’affaire Daniel c. Rogers, [1918] 2 KB 228, le lord juge Scrutton s’exprime comme suit, à la page 234 : « Depuis l’arrêt Armory c. Delamirie, 1 Str. 505, il est bien établi que la simple possession suffit pour donner le droit à une personne d’intenter une action pour appropriation illicite, et qu’elle n’a pas à faire la preuve de la façon dont elle a obtenu la possession ». […]

Dans Williams on Personal Property, 18e éd., aux pages 51 et 52, l’auteur énonce le droit comme suit : « L’inventeur, ou celui qui prend sans droit les biens d’un autre, peut opposer son droit à tous, sauf au propriétaire. S’il est dépossédé par un tiers, il peut faire valoir tous les recours du propriétaire des biens pour les recouvrer ou en recouvrer la valeur. Le tiers ne peut lui opposer le droit du propriétaire (jus tertii) en défense à l’action, à moins qu’il démontre qu’il agissait avec l’autorisation du propriétaire ». […]

En appliquant le droit que je viens d’exposer aux faits en l’espèce, je suis convaincu que le demandeur n’était pas un « véritable inventeur » au sens où ce terme est utilisé par les juristes et les auteurs. L’argent n’a pas été trouvé dans un chemin public, un endroit public ou un endroit auquel le public a accès sur permission ou avec autorisation, et rien ne nous permet de croire qu’il avait été perdu au sens véritable de ce terme. Il avait été soigneusement placé dans le contenant en vue de le cacher à l’endroit où il a été découvert. Il se peut qu’il ait été caché par un voleur, ou qu’il ait été abandonné, mais il n’a pas été perdu dans le sens où un portefeuille est perdu si on l’échappe dans la rue, ou les billets de banque dans l’affaireBridges c. Hawkesworth [[1851] 21 LJQB 75], ou le bijou dans l’affaire Armory c. Delamirie, ou la broche dans l’affaire Hannah c. Peel [[1945] KB 509]. La personne qui a mis l’argent là où il a été trouvé l’y a placé délibérément.

Le demandeur n’avait pas le droit de l’enlever de la propriété d’un autre, et il ne fait aucun doute qu’il l’a pris sans droit. La question plus difficile à résoudre est celle de savoir s’il avait une intention criminelle et si la prise de possession était de nature criminelle, et, si c’est le cas, s’il a les mêmes droits que celui qui a pris un objet sans droit dans des circonstances qui ne constituent pas un acte de nature criminelle. Il faut établir une distinction entre l’espèce et les affaires Bridges c. Hawkesworth et Hannah c. Peel, car dans ces deux affaires, le demandeur avait immédiatement divulgué son acte, dans le premier cas au marchand, dans le second à la police, ce qui réfutait l’intention de voler. En l’espèce, on a tenté à tout prix de dissimuler le fait que le demandeur avait pris possession de l’argent et l’avait enlevé de l’endroit où il l’avait trouvé.

On trouve dans Pollock & Wright, op. cit., aux pages 171 à 187, une étude approfondie du droit, tant ancien que moderne, applicable à cet élément de l’affaire. La conclusion à laquelle j’en suis venu est qu’il ne m’est pas nécessaire de décider si l’objet a été pris avec une intention criminelle ou non, car je pense qu’en l’espèce le résultat est le même. À mon avis, la jurisprudence que j’ai mentionnée fonde la conclusion suivant laquelle lorsque A pénètre sur le terrain de B et prend possession de chatels et enlève les chatels à l’égard desquels B ne prétend à aucun droit, et que A est injustement dépossédé de ces chatels, il peut intenter une action pour les recouvrer.

La question qu’il faut décider ensuite est celle de savoir si le demandeur s’est dépossédé de l’argent au profit de sa mère de façon à se priver de son droit d’action. Le simple fait que la possession du demandeur ait pu être interrompue ne signifie pas nécessairement qu’il ne peut intenter une action contre celui qui en dépossède à tort son successeur en possession. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un énoncé obligatoire du droit, j’adopte le raisonnement tenu par Holmes, op. cit., aux pages 236 et 237 :

De la même façon que l’exigence de la contrepartie et de la promesse pour créer un droit de nature contractuelle n’emporte pas que la contrepartie et la promesse doivent subsister entre les parties jusqu’au moment de l’exécution, il ne s’ensuit pas du simple fait que certains éléments doivent être réunis pour donner naissance aux droits accessoires à la possession que ces éléments doivent subsister pour que ces droits subsistent. Lorsque certains éléments ont donné naissance à un droit, il n’y a aucune raison en droit de décider que le droit est éteint, sauf si se manifestent des faits incompatibles avec sa subsistance, bien que les raisons retenues pour conférer un droit donné puissent avoir un poids important pour décider quels sont ces faits. L’extinction du rapport original avec l’objet peut être considérée comme un de ces faits, mais ne l’a jamais été, sauf à des époques moins civilisées que la nôtre. […] Par conséquent, on a décidé expressément que lorsqu’une personne trouve des billots à la dérive et les attache, mais qu’ils s’échappent et sont trouvés par quelqu’un d’autre, le premier inventeur conserve les droits découlant de sa possession et peut poursuivre le second inventeur en appropriation illicite s’il refuse de les lui rendre.

Pour pouvoir demander en justice le recouvrement d’un bien, l’inventeur ou celui qui a pris le bien sans droit, doit en avoir pris effectivement possession; une fois la possession acquise, il n’est pas nécessaire pour la conserver de continuer à exercer activement la mainmise nécessaire pour obtenir la possession originale. Il n’y a pas dépossession tant que le pouvoir de recouvrer la mainmise effective subsiste : Williams, op. cit., à la page 53. Les difficultés qui peuvent découler de la prétention suivant laquelle le demandeur s’est volontairement départi de l’argent en le remettant à sa mère peuvent être réfutées en joignant Mme Bird comme partie en sa qualité personnelle. Cette prétention n’a pas été soulevée dans les actes de procédure et je suis d’avis qu’on peut en faire fi.

Il reste à régler la question de savoir si la police a pris possession de l’argent en application régulière de la loi, si celui-ci est détenu en fiducie pour son propriétaire et si la common law énoncée dans l’arrêtBuckley c. Gross, 3 B. & S. 566, s’applique. […]

Je n’ai trouvé aucune jurisprudence justifiant l’agent de police de prendre possession de droit de l’argent comme il l’a fait en l’espèce. Cela étant, il faut interpréter l’opération survenue entre lui et la mère du demandeur de la façon suivante : le policier, croyant qu’on pourrait retrouver le véritable propriétaire, a demandé que l’argent lui soit remis pour qu’il le détienne comme dépositaire du demandeur pendant qu’on cherchait le véritable propriétaire. Lorsqu’il a été incapable de découvrir le véritable propriétaire, et en l’absence d’autres réclamations, il aurait dû remettre l’argent à ceux dont il l’avait obtenu. La défenderesse ne peut faire valoir de droit supérieur à celui que le policier aurait eu s’il ne lui avait pas remis l’argent, et elle est par conséquent redevable du montant au demandeur.

Même si, dans les circonstances, l’argent avait été saisi en application d’un mandat de perquisition, l’agent aurait été tenu de le remettre une fois qu’on n’a pu découvrir le véritable propriétaire ni obtenir de déclaration de culpabilité.

Le demandeur aura droit à mille quatre cent trente dollars et aux intérêts accumulés dans le compte bancaire. La somme sera consignée au tribunal au crédit du mineur et lui sera versée lorsqu’il atteindra l’âge de vingt et un ans. […]

Jugement en faveur du demandeur.